Pour le fonds Theodorus, la conquête de l’Amérique passe par le Québec
Le fonds d’amorçage belge s’ouvre un accès privilégié au marché nord-américain avec un nouveau partenaire québécois, le Fonds de Solidarité FTQ. Il lève 38 millions et va pousser les spin-offs belges ainsi que leurs équivalentes canadiennes à franchir l’océan.
Theodorus, le fonds d’amorçage belge orienté sciences de la vie et technologie, met la dernière main à la récolte de son quatrième fonds. Après avoir engrangé 25 millions d’euros lors des deux premières phases, le nouveau « Theodorus IV » vient de lever 13 millions supplémentaires en accueillant, pour l’occasion, un partenaire québécois, le Fonds de Solidarité FTQ. Ce dernier a contribué à hauteur de 5,5 millions, tandis que le solde a été apporté par une série d’investisseurs belges, dont le holding fédéral SFPI (qui était déjà actionnaire) et l’invest carolo Sambrinvest.38MILLIONS €Avec les 13 millions d’euros que viennent d’apporter le fonds québécois et les investisseurs belges, les moyens de Theodorus IV sont passés à 38 millions.
Les responsables de Theodorus IV prévoient d’encore moissonner quelque 2 millions avant de clôturer la récolte à 40 millions d’ici avril. Entre-temps, l’entrée du fonds québécois marque un nouveau développement dans l’histoire de Theodorus: le partenaire historique de l’Université libre de Bruxelles va en effet déployer ses activités au Québec et créer un axe Belgique-Canada qui fonctionnera dans les deux sens.
« Nous allons aider des spin-offs belges à aller au Québec et en Amérique du Nord et aider des québécoises à venir en Belgique et sur le marché européen », explique Marie Bouillez, managing partner de Theodorus. « L’Amérique du Nord est un marché essentiel pour la haute technologie, tandis qu’au Québec, les jeunes pousses ne disposent pas de fonds comme le nôtre. »
Equilibrer recherche et amorçage
« Nous allons aider des spin-offs belges à aller au Québec et en Amérique du Nord et aider des québécoises à venir en Belgique et sur le marché européen. » MARIE BOUILLEZ, MANAGING PARNER, THEODORUS
L’initiative est née d’un constat: au Québec, les fonds alloués à la recherche sont abondants (1,8 milliard d’euros), alors que ceux dédiés aux spin-offs sont faibles (230 millions). En Belgique, les deux montants sont proches, 1 milliard et 1,1 milliard, selon KPMG. « Il existe certes quelques fonds dédiés aux spin-offs au Québec, poursuit Marie Bouillez, mais ils sont rares et très spécialisés: l’un ne fait que de la biotech, un autre que du business-to-business. » Au siège du Fonds de Solidarité FTQ, le vice-président Investissement Didier Leconte confirme: « Le trou entre les résultats de la recherche et le marché montre qu’il y a un besoin criant. Et Theodorus est un outil qui a fait ses preuves en Belgique. »
Le fonds belge a donc un savoir-faire et une expérience à faire valoir sur les rives du Saint-Laurent. Il a décidé d’ouvrir un bureau à Montréal, avec trois personnes à bord. Et entend multiplier les partenariats avec les organisations mises en place là-bas: dabord, avec les « sociétés de valorisation de la recherche », des joint-ventures entre les universités qui les aident à externaliser la recherche, et les « consortiums de recherche », des organismes financiers qui octroient des subsides par secteur.Vue en plein écran
20 participations
Theodorus IV a pour objectif d’investir dans une vingtaine d’entreprises en Belgique et au Québec sur les cinq ans à venir.
Theodorus IV a pour objectif d’investir dans une vingtaine d’entreprises en Belgique et au Québec sur les cinq ans à venir. Le fonds a déjà choisi une première spin-off québécoise, Moonshot Health, dans laquelle il va injecter un million de dollars canadiens (CAD). « Cette société a développé une technologie qui permet d’identifier les comportements anormaux de personnes âgées isolées », explique Marie Bouillez. Avec un mélange d’intelligence artificielle et d’internet des objets, elle détecte à distance la chute d’une personne, l’emballement de son rythme cardiaque ou la hausse de sa température corporelle avant de lancer l’alerte. Le système a déjà passé un test auprès de personnes âgées dans 200 appartements.
Et côté belge? « Plusieurs des spin-offs dans notre portefeuille veulent s’attaquer à l’Amérique du Nord« , répond la managing partner. Elle cite notamment Antigon, la société qui a mis au point un dispositif plus sécurisé pour les transfusions sanguines.
Co-investissement
L’opération permettra par ailleurs à Theodorus d’accéder au « pipeline » de projets des universités québécoises, Montréal, McGill, Laval et Sherbrooke. »Nous sommes un outil de retraite, mais pas un fonds de pension: nos gens sont directement actionnaires. » DIDIER LECONTE, VICE-PRÉSIDENT INVESTISSEMENT, SCIENCES DE LA VIE ET GESTION DE FONDS, FONDS DE SOLIDARITÉ FTQ
Il pourra, enfin, co-investir avec le Fonds de Soldarité FTQ. « Notre fonds a été créé par le syndicat FTQ au début des années 1980, explique Didier Leconte. Aujourd’hui, nous comptons 716.000 actionnaires et nous gérons pour 16,7 milliards de CAD d’actifs. Nous sommes un outil de retraite, mais pas un fonds de pension: nos gens sont directement actionnaires. Nous gérons un vaste portefeuille dans la biotech, les technologies de l’information, l’industrie.zéro et la technologie environnementale. Theodorus se situe plus en amont de nous. »
A travers cet accord avec Theodorus, le fonds québécois entrevoit aussi un potentiel de collaboration future avec un de ses actionnaires, la SFPI. A suivre…